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IDEAT: Rencontre avec Laurent Blanc

IDEAT

IDEAT : idée, design, évasion, architecture, tendance. Paris, métro Bastille, direction la rédaction de la référence des magazines lifestyle français. Laurent Blanc, l’éditeur et le rédacteur en chef, m’accueille dans son nouveau bureau. Le vaste espace blanc est rythmé d’objets, livres, tableaux et meubles, où le design, l’art contemporain et la photographie sont omniprésents.  L’ancien directeur de la publicité de Renault semble être aussi un collectionneur.

Qu’avez-vous pensez de Maison et Objet (qui s’est tenu du 9 au 13 septembre dernier)?  Le salon de janvier est toujours mieux. Il manquait Cinna, Roche Bobois… L’outdoor était bien. Aujourd’hui l’outdoor fait travailler des grands designers.

Comment est né IDEAT? On a crée IDEAT il y a onze ans, avec mon épouse qui était styliste déco. Au départ on voulait créer un concept store de 1500 mètres carrés. Quand on a vu les prix des locations, c’était plutôt 50 mètres carrés qu’on pouvait se permettre. On a crée le magazine, c’était un moyen de mettre en avant ce qu’on aimait bien. Nous étions le premier magazine de lifestyle français, à l’époque des magazines spécialisés dans l’art de vivre à la française, comme par exemple Côté Sud. C’était durant la bulle Internet, le presse papier a terme ne devait plus exister (sourire). Le magazine a vivoté pendant 3-4 ans, on ne se payait pas. En 2003, l’entrée de Roularta au capital d’IDEAT nous a aidé. Nous sommes à 50/50. Il y a 4 ans, nous étions un peu le Habitat de la presse spécialisée. On a eu une volonté délibérée d’élitiser le magazine. Nous nous sommes repositionner haut de gamme.

The Good Life

Depuis IDEAT est une success story? Depuis 2006, c’est la plus forte augmentation de vente de magazines de décoration en France (80.000 exemplaires). On lance un IDEAT italien l’an prochain et on travaille sur le projet d’IDEAT concept store en ligne. Votre regard a-t-il changé? Notre oeil s’est aiguisé grâce aux voyages et à la rencontre avec les designers… Starck, Wanders, Jean-Marie Massaud… Nous avons développé un goût sûre qu’on retranscrit dans le magazine. Le titre a évolué, c’est un ras de marée : les français sont en train d’aimer le design. Et IDEAT est une référence dans la presse grand public.

Quelles sont vos prochaines thématiques?  Un numéro sur 3 est dédié à un thème fort: 100% de la pagination est dédié à un thème.  Nous avons réalisé le premier thème sur Philippe Starck qui a crée les textes et visuels d’une vingtaine de pages dans le magazine. Ce numéro s’est vendu à 150.000 exemplaires.

Et ce nouveau magazine masculin qui sort le 19 octobre? Laurent Blanc allume son Ipad pour présenter la maquette de THE GOOD LIFE. Un trimestriel de 350 pages, dont une centaine de pages de publicité. On va faire l’inverse de ce que font les titres de news : nous allons faire un magazine hybride  qui ne ressemble à rien… avec des articles sur la culture économique mondiale. Parmi les rubriques récurrentes : un papier sur les gens qui font avancer le monde positivement (pas de people, ni sportifs, ni politiques…). Il y aura aussi 30 pages de mode. La curiosité de la modernité, c’est un peu le combat qu’on mène.

Succès garanti? Il faut que ça plaise. J’angoisse même de plus en plus à mesure qu’on approche de sa sortie.

Merci Laurent Blanc.

www.ideat.fr  &  www.thegoodlife.fr

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Eric Russon: L’interview au café Belga

Flagey sous la neige, pittoresques étangs :

j’entre dans le café Belga. Regarde perplexe des rangées de ventilos rétro au plafond sur fond de poudreuse dehors, derrière d’immenses baies vitrées. La proximité des studios de tournage, j’ai rendez-vous avec « Monsieur Culture » d’Arte Belgique, Eric Russon, rédacteur en chef et animateur de « 50 Degrés Nord », émission quotidienne sur l’actualité artistique belge.

– J’ai pas la vocation de la télévision. On peut avoir la vocation du journalisme sportif par exemple, mais pas de la télé. Ca me paraît un peu… bizarre. Je ne sais pas comment fonctionnent les journalistes. J’ai ma carte de journaliste. Mais je ne me sens pas journaliste. J’ai peut-être une vision très romantique du vrai journaliste qui part à l’autre bout du monde, qui prend des risques. Je me vois plus comme quelqu’un de curieux qui essaye de susciter la curiosité. 

Sur la table, l’agenda cover manga d’Eric Russon,

lumière blanche aveuglante d’un soleil d’hiver. Son parcours est assez atypique : des études de Droit, deux licences et une agrégation de Criminologie à l’ULB (Université Libre de Bruxelles). 

–  A l’unif, j’ai fait de la radio libre pendant quatre-cinq ans, jusqu’en 88. Puis j’ai commencé à travailler par hasard comme assistant de production sur une émission de cinéma à Télé Bruxelles (télévision de la région bruxelloise). J’avais juste la passion de la culture. Je suis passé aux reportages culturels et à l’antenne dès 89, dans une émission d’actu du cinéma. Et dans d’autres émissions, dont une sur les courts métrages, où nous avons présentés trois cent courts métrages belges en 6 ans. Puis il y a eu le R.V. culturel quotidien à 18-19h collé au JT : 1h de direct avec des invités. Je suis resté à Télé Bruxelles jusqu’en 2006. Dès 2004, je revenais à la radio sur La Première (RTBF) dans l’émission « Culture Club ».

Du beglo belge ?

– Non. A « 50 Degrés Nord », sept invités sur dix sont belgo belges : pour plein de raisons, souvent les artistes étrangers viennent en promo et des choses intéressantes peuvent s’échanger. Ils sont souvent plus à l’aise que les belges qui ont moins l’habitude de passer en télé. Et puis je ne sais pas pourquoi les belges ont souvent ce complexe d’infériorité. Je ne comprends pas.

Pourtant le belge s’exporte bien ! On ne compte plus le nombre de belges qui réussissent à Paris.

– Oui le belge s’exporte bien et le belge se vend bien quand il passe à la télé. La télé, c’est un spectacle et on fait de l’info : raconter une bonne histoire et un bon casting de chroniqueurs et d’invités. On installe une atmosphère, il faut aussi créer une tension. On fixe une série de thématiques. Je suis à la base du choix des sujets, cinq par émissions. Je fais parler mon intuition par rapport aux actualités. L’équipe se compose du producteur, quatre journalistes qui filment les sujets et de plusieurs chroniqueurs. Je suis le seul journaliste qui apparaît sur l’antenne. Avec les invités je préfère installer un climat de conversation, de dialogue, parfois dans la critique. L’artiste donne la couleur générale du débat. La conversation est beaucoup plus souple que dans l’interview.

Et l’audimat?

Eric Russon repose sa tasse, le regard plongé dans son thé à la menthe. Plus beaucoup de temps, passer en mode questions-réponses: et l’audimat?

–  Je n’en tiens pas compte. La Belgique est un très petit pays, dix millions d’habitants, dont quatre millions de francophones. J’ai de la distance, on se fout un petit peu des chiffres. Par émission, on doit avoir entre soixante et soixante-dix mille personnes. Je compare une émission culturelle à du théâtre subventionnée : la culture n’est pas là pour faire du chiffre. Il n’y a pas d’équivalent de notre émission chez les flamands. Sur dix invités, un à deux sont flamands. Ils étaient très étonnés au début lorsque nous les contactions pour venir sur le plateau. Il y a eu une mixité culturelle avant, entre les communautés wallonne et flamande, mais plus du tout aujourd’hui. Le cinéma flamand marche beaucoup mieux auprès de son public flamand et idem pour le cinéma wallon. Par exemple, le film « De Zaaak Alzheimer » (La mémoire du Tueur) du réalisateur flamand Erik Van Looy, sorti en 2003, a rencontré le succès à l’étranger avant d’être distribué en Wallonie. Lorsque nous allons à Cannes, pour les étrangers nous sommes tous des belges. Nous avons deux chroniqueurs flamands : Nick Balthazar, cinéaste et Bert Kruisman qui a écrit un spectacle « La Flandre pour les Nuls », un humour très rentre-dedans.

L’heure a filé. Une dernière question : Bruxelles?

– Une ville à l’offre culturelle vraiment très variée. C’est aussi une ville très concentrée qui par ailleurs m’énerve énormément. Un peu de neige et toute la circulation est bloquée. Bruxelles a mieux bougé avant : la vie nocturne il faut la trouver! Le Belga, c’est presque un des seuls lieux de la nuit, où il se passe quelque chose jusqu’à très tard. C’est une drôle de ville, pas une ville qui se couche tard. C’est un peu poli.

Un quartier :  le quartier de l’unif, près du cimetière d’Ixelles, même si je ne suis pas le genre nostalgique à faire un pèlerinage. Il y a plein de restaurants, de bars, une vie nocturne.

Merci Eric Russon.

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