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La mode selon Gaspard Yurkievich

Paris, dans les dix heures et quelques douces grisailles, j’aime pas tous les matins du monde. Le Marais semi désert s’éveille lentement, comme le rituel d’une vieille dame digne excentrique et rangée. L’on y fait des rencontres, besoin de me mettre en marche. L’Ipod guerrier, un vieux Blondie « Atomic » western, suis accro.

Impression de blancheur écaillée jusqu’au ciel blanc étouffé, le genre de luminosité vide, cour pavée ondulante, murs ni droits ni rectilignes, d’un décor expressionniste allemand où les perspectives se défilent dans tous les sens. Petite porte en bois brut, large escalier, le vernis noir et épais qui tranche avec de petites lettres blanches, j’y suis je sonne : Gaspard Yurkievich.

Show room blanc dépouillé un néon message devant un néon éclairage, ambiance studieuse dans la pièce voisine où s’affaire l’état major. Quelques snapshots, géométrie de couleurs sur chaussettes noires, des portants, la collection homme présentée la semaine précédente. De l’ensemble émane une idée de rigueur ponctuée d’une fantaisie maîtrisée. Gaspard, simple, arrive avec Virginie, son attachée de presse, on s’assoie. 

– Berçot, c’est un peu comme une psychothérapie, un peu comme l’Actor Studio. 

Des études au Studio Berçot, une expérience chez Colonna et avant le tremplin du festival de Hyères, l’« étape » d’assistant défilés au bureau de presse d’Isabelle Roch : 

– J’avais besoin de me désinhiber. 

Sourire et d’ajouter l’œil espiègle:

– Enfant, j’avais un monde intérieur très développé, je ne m’ennuyais jamais, je dessinais. J’adorai chanter et danser, la musique. Flash total sur Diana Ross, il y a deux ans. On adore la danse, le corps. Une idée unique du corps, ça c’est flippant. J’habille mes amis qui pratiquent nos vêtements. On est hyper critique vis-à-vis de nous-même. 

Pas pu m’empêcher de lui dire combien j’aimais depuis les débuts ses chaussures : 

– Merci. La chaussure pour moi, c’est hyper facile.  

Tandis que ses mains pianotent parmi les quelques paires de la prochaine collection Femme (une exclu spéciale pour vous!), Gaspard décrit son approche de la mode « à la fois super parisienne et assez contemporaine »  : 

– On y est allé naïf et complètement libre. Imposer un langage, une identité. Créer un sens entre l’esprit et le corps : redéfinir le cliché de la mode, un lien entre l’establishment et le traditionnel. Notre marque tient sur une philosophie : le vêtement est le compagnon du jour. L’approche est de plus en plus élaborée. C’est sexy mais c’est un vrai vêtement. La première collection Homme est née des fondations de la collection Femme. Mais toutes les collections existent par elles-mêmes.

De façon naturelle, depuis l’enfance, Gaspard conjugue l’Art Contemporain avec plaisir, d’où ses collaborations avec différents artistes, dont Edouard Levé et l’architecte Didier Faustino pour certains de ses shows : 

– C’est un peu la récrée, je suis comme un directeur artistique sur un défilé : un casting de visions, comme des clés données aux gens. On vit un moment très très fort. Je fonctionne complètement à l’affect. 

Je pense à ce fameux dessert pour le « mythique » Café de La Paix : 

– On adore la nourriture, l’idée de générosité. On voulait que ce soit sexy et gourmand : avec une fève dans un écrin. Au début, j’avais imaginé un gâteau forêt noir puissant, écrasé par une chaussure pour une expo organisée par un magazine japonais. C’est drôle! 

Ai changé de place, besoin d’angles différents, du fameux « mécanisme créatif » dont me parle Gaspard de plus en plus prolixe. Pour la prochaine collection Femme, il s’est inspiré d’un livre introuvable en France, Pierre Berger et Karl Lagerfeld s’opposeraient à sa sortie : « Beautiful Fall » d’Alicia Drake. J’aime le principe de l’interdit !

– L’histoire d’Yves Saint Laurent, Lagerfeld, Antonio Lopez. Les années 70 : comment les gens s’habillaient, c’est pas du tout intéressant. C’est plus l’esprit couture, les égéries, Loulou de La Falaise : prendre leur énergie, le phantasme de cette époque. La transmission entre la couture et le prêt-à-porter.

De ses nombreux voyages pour le travail, Gaspard retient « l’influence d’énergie, pas le folklorique » :

– Il y a un dialogue. J’aime beaucoup la culture américaine. Les Etats-Unis recyclent beaucoup, le vintage. En rejoignant le Crazy Horse à Las Vegas, on a dû passer une journée à Detroit, où on a trouvé une excellente boutique vintage et découvert l’expo d’Anthony McCall. 

Et lorsque Gaspard, l’ultra parisien est à Paris : 

– Je vis Rive Gauche et je travaille Rive Droite.

Je quitte le show room, avec cette phrase de Gaspard en tête: 

– J’adore la mode, ce sont des propositions, c’est comme un dialogue. 

Alors Gaspard merci pour ce joli dialogue! 

Ses adresses :

– Une suite dans un hôtel particulier : aux interrupteurs designés par Gaspard himself, avec les silhouhettes de danseuses du Crazy Horse… so chic ! L’Hotel Particulier de Montmartre : www.hotel-particulier-montmartre.com/wordpress/ 

– Un restaurant fusion frenchy nihon : « le chef japonais cuisine de la gastronomie française » Les Cartes Postales : 7 rue Gomboust, 75001 Paris – Tel : + 33 (0) 1 42 61 02 93 – Une curiosité « Artscience » : « centre d’Art Contemporain » Le Laboratoire :  www.lelaboratoire.org 

– Une architecture : Beaubourg « bien sûr »   www.centrepompidou.fr/   

« Paris nostalgique » : Le Crazy Horse   www.lecrazyhorseparis.com 

www.gaspardyurkievich.com

 

Autre articles :

Gaspard Yurkievich: Défilé Homme Eté 2009, Backstage

Paris Collections Femme Automne-Hiver 2008: Gaspard Yurkievich

INTERVIEWS  

 

  

Mushi Mushi!

Beijing, coincée dans d’interminables embouteillages : j’ai rendez-vous avec Caroline Deleus, la créatrice française de la marque chinoise Mushi. Et bien sûr je ne sais absolument pas où je suis! Impossible de communiquer avec le chauffeur. J’appelle Caroline qui vérifie avec le taxi : nous serions à cinq minutes du Twin Tower Mall, où se trouve sa seconde boutique inaugurée en mai dernier. Tout est gigantesque dans Beijing, les minutes, les distances, les routes, les buildings, les halls de buildings : enfin la boutique, épurée aux murs blancs maculés, à effet de vagues, contrastant avec les lignes nettes noires des portants. Du blanc et du noir habillent les cintres à l’exception d’une unique robe bleue, taille marquée et épaulettes bouffantes, romantique « inspirée par des souvenirs d’enfance ». Enfin Caroline, assistée de ses deux collaboratrices chinoises. Première impression agréable d’une belle trentenaire, vêtue simplement d’un jeans et d’un débardeur noir au motif rouge de la « Wawa », la poupée en tissu, effigie de sa marque que j’avais découverte à Paris chez une amie.

Après le Lycée Français de Beijing, Esmod à Paris où elle suivait des études de stylisme qu’elle compléta par une expérience au bureau de presse de Lolita Lempicka. Consciente des difficultés d’un marché parisien plus que saturé : retour en Chine, où en 2002, elle créa sa marque. Mushi que l’on pourrait traduire du Mandarin par : « le modèle de l’ouest ». Un premier défilé, suivit de l’ouverture d’un showroom six mois plus tard, ainsi que le soutient inconditionnel de la presse chinoise, permettent  à sa griffe de remporter un succès immédiat. Aujourd’hui à raison de deux shows par an, elle habille les business women, les stars des media et du cinéma chinoisL’actrice principale Yu Nan, du film chinois qui a reçu l’Ours d’Or de Berlin 2007, « Le Mariage de Tuya » du réalisateur Wang Quan An, portait une robe Mushi lors de la cérémonie de remise des prix. Consécration pour Caroline. « Je ne réalise pas, je n’ai pas eu le temps de voir ce que j’ai fait depuis cinq ans. Ici tout est possible et il faut le faire rapidement ». 

« J’ai vraiment une clientèle que j’aime, un public de fidèles. Mes clientes sont des personnages », à quatre-vingt pourcent des chinoises, de 35 ans, à forte personnalité, recherchant un style minimaliste, où chaque modèle est impeccablement produit en série limitée. Mushi privilégie la coupe et le service sur-mesure rapide : « Le but est de mettre la femme en valeur. Je fais du simple, tout est dans la coupe. J’adore marquer la taille. J’aime beaucoup les bustiers, les combinaisons pantalons, les pantalons amples, les petits détails, les cols Mao réinterprétés de façon plus moderne ». Il n’y a pas ou très peu de couleur chez Mushi, passionnément du noir et du blanc : « Les chinois m’ont appris à aimer le rouge ». Les matières sont naturelles, l’été plutôt lin et coton et l’hiver, cuir et lainage.

 

 

“La femme Mushi est une femme à plusieurs facettes”. Caroline s’imprègne du feeling du moment « Je rentre dans un film et j’élabore un sénario. Cette saison, c’est un rappel à l’enfance ». Mais il demeure une constante source d’inspiration : « Pékin, cette ville tellement bourrée de contrastes: c’est ma ville, elle est en moi. On ne pourra pas m’arracher d’ici. J’aime son dynamisme et son gigantisme ».

 

Autres articles : INTERVIEWS

 

 

 

“A Vain Life”, Solo Exhibition of Yangfan

Wow ! A bitter sweet candy! Do you wanna taste it? You knew it, didn’t you? Let me introduce you one of my first Chinese contemporary art crush. On the red brick wall of the 798, the Beijing hugh factory of Chinese contemporary art (next article) : a colourful poster of a young and lovely girl that strikes the pose in an acid pink background. Between Manga and trendy magazines, the style of the painting is very simple and childish. Yeah, a sweet pink candie, with a bit of lemon!Few days later : I meet Yangfan. Boy or girl? The painter doesn’t speak English and I don’t understand Mandarin: lost in translation? Fortunately, there is the blessed Jenny, the Linda Gallery assistant where Yangfan exhibits. Thanks Jen!

You got it baby ! Yangfan is a girl. And she paints girls. A light “Sex in the city” influence: in girl speech, girls talk about girls as well speaking to everybody. In the gallery, men look at the paintings carefully. The refined Yangfan shows the sensitive part of those girls. They are beautiful, look like innocent and hype, but they miss life. Her message: describing those fashion girls. They became one of today Chinese society symbols.

– Today, there is a lack of spirituality, we let spiritual things.

Her painting expresses a kind of depressive feeling, between soulful sadness, happiness and questions about life:

– Those girls have more freedom, but it happened very quickly and now they are single and alone.

Yangfan’s painted for ten years and she is also a university professor of painting:

– After school, I was wondering how to become an artist? And at this time, I had the idea to pay attention of the last generations of women and their future.

The way she works : daytime for painting and nights to look at people, their way to talk, move, their clothes.

– I imagine their work and I create short fashion stories. I’m also a fashion designer for fun.Besides the clothes of her depressive smooth characters came from her imagination.

The future: always painting. Cotton sculptures, of girls course. And for next year, unique dolls with Chinese traditional details for a gallery exhibition. Finally sometimes, trendy girls can live something else than “a vain solo life”. The proof, the successful Yangfan is not single and not alone.

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