Oh ! Le joli bonbon super acidulé qui laisse un goût amer, ça vous dit? Dès le titre, vous l’aviez pressenti ? Quelle perspicacité ! Comment résumer un de mes coups de cœur, à l’opposé de la tendance massive dominante de l’art contemporain chinois. Sur un mur de brique rouge du 798, le grand sanctuaire d’art contemporain à Beijing (article à venir) : l’affiche colorée d’une « jeune et jolie » fille archi girly, sur fond rose uni acidulé. La pause inspirée des magazines hype, quant au rendu, déconcertant de simplicité, limite enfantin. Oui, un vrai bonbon à la rose, avec un zeste de lemon. Quelques jours plus tard, rencontre avec Yangfan. Petit jeu : homme ou femme ? L’artiste peintre ne parle pas un mot d’anglais et moi, pas un de mandarin : lost in translation ? Heureusement il y a Jenny, pleine de bonne volonté mais dont l’anglais est assez difficile à saisir, la jeune assistante de la Linda Gallery, où expose Yangfan qui nous servira d’interprète. Merci Jen !
Gagné, Yangfan est une fille. Qui peint des filles. Déclinaison régressive et ingénue de l’univers « Sex in the City » de filles qui parlent de filles en langage filles, en s’adressant à tous. Dans la galerie, beaucoup d’hommes regardent les toiles avec attention. Yangfan la délicate dépeint la fragilité de filles superficielles, extraites du réel et isolées dans les fonds unis de ses peintures. Elles sont belles, parfaitement accessoirisées, mais il leur manque l’essentiel, une vie. Son message. Clair. Montrer ces filles obsédées de mode, dont l’unique but est de s’acheter toujours plus de fringues, avides de matérialisme et du paraître. Ces filles qui sont devenues un des symboles de la société chinoise actuelle :
– Aujourd’hui, il y a un manque de spiritualité, on met de côté beaucoup de choses spirituelles.
Deux lectures possibles des tableaux de Yangfan. D’où émerge une certaine contradiction :
– Ces jeunes femmes ont gagné en liberté, mais comme ça s’est passé très rapidement, elles se retrouvent seules et célibataires.
Ses toiles, sous une forme délibérément simpliste, décrivent une forme de dépression, entre tristesse, bonheur et questionnement sur la vie. Yangfan peint depuis 10 ans et se partage entre sa carrière de peintre et de professeur de peinture à l’Université:
– Après avoir quitté l’école, je me demandais comment devenir une artiste ? Et c’est alors que j’ai eu l’idée de traiter des dernières générations de femmes et de les projeter dans le futur.
Sa manière de travailler : ses jours à peindre, ses nuits à regarder les gens, leurs expressions, vêtements.
– J’imagine leur travail, j’invente de petites « fashion stories ». Je suis aussi styliste par plaisir.
D’ailleurs les fringues de ces héroïnes lisses dépressives sortent tout droit de son imagination. Le futur. Toujours à peindre. Des sculptures en coton, de filles, toujours. Et l’an prochain, des poupées uniques avec des détails traditionnels chinois pour exposer dans une galerie. Finalement être une fille dans l’air du temps, ne rime pas forcément avec « a vain solo life » ! La preuve, Yangfan n’est ni seule ni célibataire.
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